
Auteur de polar et de fantasy, Olivier Gay débute une carrière d'écrivain sur les chapeaux de roue puisqu'il remporte en 2012, le prix du premier roman policier du Festival international du film policier de Beaune avec Les talons hauts rapprochent les filles du ciel. Apparaît le personnage récurrent Fitz, trentenaire fêtard, coureur de jupons et dealer spécialisé dans la cocaïne ! Tout un programme !
On le retrouve dans Les mannequins ne sont pas des filles modèles (2013) ainsi que dans son dernier roman, Mais je fais quoi du corps ? (Le Masque), sélectionné pour "Les explorateurs du polar" sur lecteurs.com. Rencontre avec un jeune écrivain prometteur.
"Mais je fais quoi du corps" est votre troisième polar, avec pour personnage principal John Fitzgerald Dumont dit "Fitz". Pourquoi créer un personnage récurrent ?
Lorsque j’ai écrit « Les talons hauts rapprochent les filles du ciel », je n’avais pas prévu de faire revenir Fitz dans d’autres aventures. Pourtant, pendant l’écriture, je me suis rendu compte qu’il me plaisait bien avec sa belle gueule, ses maladresses, sa lose perpétuelle et son autodérision. J’ai donc commencé à réfléchir à la possibilité de le transformer en héros récurrent.
Les séries permettent aux écrivains d’étoffer petit à à petit leurs personnages, de rajouter des détails sur leurs loisirs, leur famille, leurs amis… Ainsi, avec chaque nouveau roman, j’ai l’impression de rendre Fitz plus réel. J’ai parfois l’impression que je pourrais lui téléphoner, prendre un verre avec lui. Bon, ça m’arrive surtout quand j’ai un peu bu, c’est vrai.
Mon personnage n’étant pas un enquêteur-type, ça s’est révélé à la fois plus difficile et plus amusant que s’il s’était agi d’un journaliste ou d’un policier. Il fallait trouver des moyens de l’impliquer dans des aventures plus rocambolesques les unes que les autres… tout en restant crédible.
Et puis aujourd’hui, lorsque je vois les réactions en dédicace, je me rends compte que Fitz a su s’imposer aux lecteurs malgré ses mauvais côtés. J’ai souvent des remarques sur la fille qui lui conviendrait le mieux, par exemple (« c’est Jessica ! Il a encore des sentiments pour lui ! » « Pas du tout, c’est Deborah, ils n’arrêtent pas de se rapprocher ! » « Moi je pense que c’est… »).
Et ça, je crois que c’est la plus belle récompense que je puisse avoir (ça, et les droits d’auteur !).
Quels sont pour vous les ingrédients essentiels d'un bon polar ?
Une intrigue efficace est bien entendu importante, mais ce n’est pas l’essentiel. Je pense que le véritable intérêt d’un polar, comme pour tout genre littéraire, réside dans ses personnages. La meilleure histoire restera fade si on n’arrive pas à s’intéresser à eux.
Par ailleurs, je trouve que le réalisme est absolument crucial. De nouveau, je ne parle pas forcément de l’intrigue – qui peut se révéler parfois tirée par les cheveux – mais du comportement des personnages. J’ai l’impression de lire un bon polar lorsque je comprends leurs réactions. L’écrivain est au service de ses héros, ce n’est pas l’inverse. Il se conduit comme un dramaturge, il tisse la trame de l’histoire – mais ses personnages restent libres.
Enfin, je suis très sensible au style (surtout depuis que j’écris à plein temps, et que je corrige mes propres textes en ouvrant des yeux horrifiés).
Si vous mélangez tout cela, il restera toujours l’ingrédient-mystère, la pincée de sel, le petit plus qui permettra à un bon livre de devenir exceptionnel. Comme dans tout travail artistique, certaines impressions restent inexplicables.
Votre roman s'ancre dans l'actualité, quelles sont vos références et vos sources d'inspiration ?
J’aime beaucoup les romans de Bret Easton Ellis ou de Benacquista.
De manière générale, je trouve intéressant d’ancrer un polar dans une époque, pour donner des marqueurs culturels (oui oui, culturels !) aux générations futures. Lorsque je lis un Agatha Christie, j’ai l’impression de sentir encore les odeurs surannées de l’Angleterre d’avant-guerre.
L’avant-dernier Stephen King, 22/11/63, m’a beaucoup plu car il s’inscrit dans cette veine : une description fouillée d’une période que je n’ai pas connue avec ses chanteurs, ses modes, ses opinions politiques, ses loisirs et ses dangers.
Mon plus grand espoir, c’est que quelqu’un tombe dans cinquante ans sur l’un de mes livres dans une brocante. Il se demandera qui sont Rihanna ou Britney Spears, froncera les sourcils en entendant parler de McDonald’s (dans une époque où la malbouffe aurait disparu) et trouvera atrocement rétro les concepts d’Instagram, de Twitter ou de Snapchat.
Comment conciliez-vous activité professionnelle et travail d'écriture ?
J’ai eu la chance de ne jamais avoir à me poser cette question. Le succès des « Talons hauts » m’a permis de quitter mon travail en cabinet de conseil pour me concentrer sur l’écriture à plein temps.
Je suis en couple, ce qui me permet de calquer mes horaires de travail sur ceux de ma compagne. Si j’avais été célibataire, je pense que ça n’aurait pas marché. Je n’ai aucune autodiscipline, et je me serais réveillé à 13h tous les jours pour petit-déjeuner d’une part de pizza froide. Bénie soit Julie pour m’avoir sauvé d’un tel destin !
Du coup, j’écris du matin au soir, et c’est un vrai bonheur. Beaucoup de week-ends sont pris par des salons, des festivals ou des dédicaces, mais j’ai toujours aimé rencontrer les lecteurs, et ça me permet de voyager partout en France sans avoir à me soucier de quoi que ce soit.
Nous ne sommes pas nombreux à vivre de notre passion, autant en profiter !
Propos recueillis par Hassina MIMOUNE
Bonjour Olivier
En tant qu'écrivain public et traducteur français-espagnol je me propose de vous traduire vos romans, qui me plaisent beaucoup, pour les publier en Espagne ou en Amérique Latine si vous êtes intéressé.
Cordialement
Antony