
Il est l’auteur d’un premier roman drôle, construit et tellement new yorkais qu’on se croirait dans une série HBO.
Triburbia (ed. Philippe Rey) est un petit bonheur satirique sur les relations hommes – femmes à l’époque contemporaine. Et le sexe fort n’est pas forcément celui qu’on croit.
-De quoi est-il question dans Triburbia ?
Triburbia est quelque chose comme un collage. Je voulais écrire un livre dont le sujet serait un petit écosystème, ici un quartier, et raconter l'histoire à travers une douzaine de personnages différents. J’aime penser que dans chaque récit individuel, le rapport au temps et au lieu ressort et qu’il est clair pour le lecteur qu’il s’agit d’un quartier riche de New York au moment de la grande crise financière de 2008.
-Pourquoi Tribeca est-il un quartier particulier et pourquoi vous avez choisi d’y placer l’histoire ?
C’était le quartier où je vivais lorsque j’ai eu des enfants, alors je connais ce quartier mieux que tout autre. Quand vous avez des enfants, vous vous insérez plus profondément dans votre communauté : vous connaissez les écoles, les enseignants, les médecins et les dentistes, les autres parents, les équipes sportives. Avant d’avoir des enfants, je ne savais même pas où se trouvaient les écoles de mon quartier. J’ai par exemple vécu dans le 5e arrondissement de Paris quand j'étais étudiant, et je ne serais pas capable de vous dire quoi que ce soit sur la vie des enfants du voisinage, simplement parce que je ne leur prêtais pas attention. Maintenant, je regarde davantage à travers la « lorgnette » de la vie de famille. Je suis moins égocentrique.
-Triburbia pose la question des rapports de force. Sadie, la petite fille qui est l’une de vos héroïnes, le découvre dans sa relation avec Cooper. Selon vous, la société se divise-t-elle forcément entre les meneurs et les suiveurs ?
Je crois que dans toute relation, une personne aime ou apprécie l'autre plus qu’elle n’est elle-même aimée. Cela crée des déséquilibres, que ce soit dans un mariage, une relation amicale ou simplement cordiale. Celui des deux qui est le moins aimé sera toujours plus en attente que l’autre, et cela le rend plus vulnérable. Les enfants aussi vivent cela, ou plus exactement ils le ressentent avec une acuité plus grande. C'est cette dynamique que j'essaie de décrire.
-Il y a quelque chose de La Ronde de Schnitzler dans Triburbia. Connaissiez vous cette œuvre ?
Je pense que La Ronde plus directement portait plus directement sur la façon dont les relations sexuelles transforment et équilibrent les relations entre les classes. Je ne sais pas qui c’est ce que fait Triburbia, puisque la plupart des relations n’y revêtent pas de caractère sexuel.
-Pourriez-vous en dire un peu plus sur les coulisses de ce roman ?
J'ai commencé à écrire des histoires, puis remarqué qu'elles s’imbriquaient plutôt bien. J'ai essayé de trouver un agent pour s’occuper de vendre le projet de ce livre à un éditeur, mais n’en ai trouvé aucun. Je finis par en dénicher un, qui ne tarde pas à m’annoncer qu’il quitte le milieu de l’édition ! Je repars en quête d’un autre agent. Et finalement, celui à qui je confie le livre l’a vendu à un éditeur que je connaissais bien puisqu’il avait déjà publié tous mes textes de non-fiction… Voilà donc une grande boucle fastidieuse qui se termine avec mon éditeur, à qui j’aurais pu montrer directement le livre d’emblée.
-Qu'est-ce qui vous a décidé à écrire un roman?
Mes textes de nonfiction devenaient ennuyeux. Dans le passé, j'étais plus créatif. Mais la société américaine est devenue très « stricte » dans ce domaine : les écrivains tentés d’être un peu imaginatifs dans leurs essais ou leurs documents peuvent avoir des ennuis, même en écrivant leurs propres mémoires. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé d’écrire un roman.
-Quels sont les livres qui ont façonné votre univers d’écrivain ?
J’aime énormément les écrivains français que sont Blaise Cendrars et Céline.
Propos reccueillis par Karine Papillaud