
À 25 ans, Arthur Loustalot signe avec La Ruche, son troisième titre. Un roman bouleversant, qui plonge le lecteur dans l'univers clos d'une famille de femmes et rompt avec les codes de l'écriture. Rencontre avec un jeune auteur qui montre une maturité moderne.
La ruche est votre troisième titre, depuis quand écrivez-vous et pourquoi ce titre ?
J'écris depuis le lycée où j'ai suivi une formation littéraire. L'envie m'est venue comme une impulsion, comme un besoin de passer par le prisme de la fiction pour exprimer des choses.
La ruche, c'est un bourdonnement de douleurs et de paroles avec une reine mère, Alice et, ses princesses, Marion, Claire et Louise. L'homme n'est plus là.
Comment est née l'idée de ce huis clos familial de femmes ?
La ruche est un livre que j'ai mûri pendant quatre-cinq ans et qui a évolué au fil du temps. Je suis parti de l'envie de raconter une communauté de femmes pour aboutir à ce huis clos entre une mère, Alice, et ses trois filles.
L'idée de départ était de créer une plongée dans un univers familial et montrer comment les petites violences ordinaires du quotidien laissent des séquelles, alors même qu'il y a tant d'amour. La ruche montre aussi comment des enfants peuvent se construire et une mère se reconstruire dans ce bourdonnement de douleurs.
Cet univers féminin entrait en résonance avec ma propre histoire, puisque j'ai moi-même été élevé dans un univers très féminin et comme le disait Romain Gary "Je ne sais pas ce que c'est la féminité. Peut-être est-ce seulement une façon d'être un homme."
L'écriture et la structure du roman sont très particulières pouvez-vous nous expliquer ?
Dans cette histoire, il fallait que le langage soit particulier, une sorte de code organique vivant, brûlant et descriptif et c'est naturellement que des impulsions de dialogues sont venues piétiner la narration.
Au début du roman, le langage est cadenassé avec beaucoup de bavardage, puis petit à petit dans la douleur et l'impuissance des filles, il prends corps et traduit les arcanes du chaos familial.
Concernant la structure du roman, je n'ai pas voulu de remontée chronologique pour arriver à la genèse, ni d'écriture thérapeutique pour essayer de comprendre le pourquoi du comment. J'ai raconté mes personnages par petites touches, ce qui explique ces allées et venues dans le temps.
En lisant La ruche, on voit l'appartement, on entend les portes qui claquent, comme dans une pièce de théâtre.
L'appartement est presque un personnage à part entière qui révèle et dévoile des choses, mais dans lequel on ne peut pas tout voir ni tout entendre.
L'appartement, c'est la circulation, mais aussi les interdits qu'Alice pose, voulant tout contrôler, y compris les mouvements, les mots...
Les filles ne deviennent-elles pas les mères de leur propre mère ?
En effet, ces trois filles sont prêtes à tout pour libérer leur mère d'un poids énorme, une façon de lui rendre cet immense amour qu'elle leur a donné lorsqu'elles étaient enfants et finalement de la prendre en charge. On vit dans une époque où les jeunes entendent tout et sont ou se sentent investis d'un rôle nouveau. Ils deviennent un peu les parents de leurs parents. Cela se traduit par de la colère, mais aussi par de l'héroïsme : sauver papa, sauver maman.
Propos recueillis par Agathe Bozon