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Des êtres sans gravité de Valéria Luiselli

Plusieurs vies dans une seule

Des êtres sans gravité de Valéria Luiselli

 

Née à Mexico, en 1983, Valéria Luiselli vit aujourd'hui à New York où elle termine un doctorat de littérature comparée à l'université de Columbia, en même temps qu'elle écrit pour des journaux mexicains et américains (New York Times et Reforma). 

Son premier titre, Papeles falsos (2010), recueil d’essais et de récits salué par la critique, lui vaut d'être pressentie comme l'un des écrivains mexicains les plus prometteurs de sa génération. Des êtres sans gravité, son premier roman déjà paru au Royaume-Uni, est en cours de traduction dans plus de dix langues.

 

 

 

 

 

 

Elle vit dans une grande et vieille maison avec son mari architecte et leurs deux jeunes enfants : le moyen et "la" bébé où elle écrit un roman silencieux pour ne pas réveiller les enfants qui dorment à côté et l'interrompent sans arrêt quand ils sont éveillés.

Son roman raconte celle qu'elle était, il y a quelques années, dans une autre vie. Quand elle vivait dans un vieil immeuble, dans un appartement vide dont elle donnait les clés à des inconnus qui devenaient connus. Une vie bohème et imprévisible de femme libre, qui croisait d'étranges personnages et hantait les bibliothèques pour le compte de son employeur, un éditeur à la recherche du nouveau Bolaño. Ses efforts semblent porter ses fruits quand elle découvre l'œuvre du poète mexicain Gilberto Owen auquel elle invente une vie.

Étrange récit où se télescopent les vies : celle d'une mère de famille, celle de la jeune fille qu'elle était, celle qu'elle invente à Owen, la vraie vie d'Owen.
S'ajoutent à ces vies, les régulières indiscrétions du mari, qui donnent au récit une dimension schizophrène : "Mon mari est furieux. Du fait de ma négligence, il a encore lu quelques-unes de ces pages. Il me demande quelle est leur dose de fiction et de réalité".

Ce roman est une réflexion sur la vie, l'évolution des êtres, les croisements, les renaissances et le hasard des rencontres.
Des rencontres qui sont chacune une leçon d'humilité, comme lorsqu'elle découvre que White, l'éditeur pour lequel elle travaille, l'a embauchée, car elle fume les mêmes cigarettes que sa femme dont la disparition l'a laissé inconsolable : "S'il m'avait engagée, c'était parce que j'avais un peu l'odeur de sa femme.(...) J'étais juste une empreinte, une fumée, un fantôme."

Une écriture lumineuse, nerveuse, très économe, qui raconte en peu de mots quelques semaines mouvementées : "Je lui parlai de la plante que j'avais prise sur la terrasse de l'ancien immeuble d'Owen, de la petite Dora qui m'avait sauvée, des vies possibles d'Owen dans le Harlem des années 1920, du nouveau bureau et de sa chaise, de Moby et des peignoirs japonais, et de ma tristesse d'avoir fait l'amour sur un grabat à côté d'une presse, avec un homme qui avait un gros nez."

Agathe Bozon

Des êtres sans gravité, Valeria Luiselli, Actes Sud, (2013)

 

 

 

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