
Michel Houellebecq confie souvent avoir l'impression écrasante de porter un monde entier sur ses épaules quand il écrit ses romans. Pour « Billie », Anna Gavalda semble s'en être tirée avec un sac à dos rempli de chamallows.
L'image paraît triviale ? Pendant les 223 pages d'un roman, la romancière use et abuse du même procédé. Cela commence par du « trou à péteux », jusqu'au « putain d'hélico en fleur », en passant par un mémorable « j'ai complètement bazardé mon disque dur pour redémarrer en mode sans échec ». Evidemment, l'auteure de « Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part » a beau toujours s'être intéressée aux « Français moyens », jamais elle n'avait fait rentrer autant de vulgarité dans la bouche de ses personnages. L'effet se révèle d'autant plus agaçant que la trame narrative se montre d'une dérisoire banalité.
L'histoire commence comme le film de « 127 heures » de Danny Boyle, l'alpiniste étant remplacé par deux paumés existentiels tombés au fond d'un ravin. Pendant que Frank, son meilleur ami homosexuel s'évanouit de douleur, Billie (nommée d'après le « Billie Jean » de Michael Jackson…) repense à leurs vies croisées sous les étoiles. Et là non plus, Anna Gavalda ne lésine pas sur les détails scabreux de la destinée de ces deux « clandestins ».
Le lecteur saura tout sur l'apprivoisement réciproque de la fille des mobile-home et du « petit pédé souffreteux », sur le dévergondage rapide de la première et de ses années « pute », du non-coming out du second, de leur déménagement à Paris et de leur transformation en bobos à Vélib'. Tout cela, agrémenté ici ou là de clichés misérabilistes, pour finir dans un trou dans les Cévennes. Même si elle a toujours été critiquée, Anna Gavalda, arrivait, parfois, à griser avec ses « petits riens ». Ici, il ne reste que du néant au fond d'un gouffre.
Billie, Anna Gavalda, éd. La Dilettante.