
La France n'aime pas les romanciers, Régis Jauffret le dit et toute son argumentation, troublante, met en question la liberté d'expression et le pouvoir de la fiction.
C'est à l'occasion de la publication de "Bravo" (ed. du Seuil), un recueil de nouvelles consacrées au déclin de la génération des babyboomers mais toujours et inlassablement à la langue et à ses limites, que lecteurs.com vous propose de rencontrer l'un des écrivains les plus puissants de sa génération.
Toute son oeuvre témoigne de son génie et d'une langue inouïe, d'Histoire d'amour à Lacrimosa, en passant par sa veine plus directement inspirée du réel : Sévère (inspiré par l'affaire Edouard Stern), Claustria (l'affaire Fritzl) ou encore La Ballade de Rykers Island qui interroge l'affaire DSK.
Il revient sur le procès qui attaque ce dernier roman et rappelle que jamais la littérature n'a été conforme au lissé d'une époque.
Les "vieux " de R.Jauffret sont terribles , et peuvent bien nous persuader que la vieillesse est un naufrage .Ici, seize vieux et vieilles nous offrent un beau florilège de personnages bien décidés à pourrir la vie de leurs survivants. C'est une mosaïque de mauvais coucheurs, de furieux, de malpropres, enfin tout ce que l'on peut redouter de la grande vieillesse. D'ailleurs, Jauffret prévient , lui qui arrive à la soixantaine qu'il se tuera(ça, c'est à voir) quand viendra la décrépitude extrême.
Cela posé, faut-il en rire ou en pleurer? J'ai bien ri, et souvent , et cela grâce à une écriture brillante, pleine de finesse et aussi d'humour, macabre certes, mais tellement drôle.
Parce que tout de même, on ne peut s'empêcher d'y reconnaître certains "vieux" que l'on a connus, et on peut se demander aussi ce à quoi on risque de ressembler!
Bref, j'ai jubilé aux bons mots de Jauffret et à son appétit pour la vie.je lui pardonne beaucoup d'horreurs. Par contre, peut-être qu'un lecteur qui découvrirait cet auteur par ce livre, serait quelque peu déstabilisé.