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C'est l'histoire d'une femme précaire, de sa vie épuisante de travail en usine ou de ménages, payée au rabais, de sa vieillesse, de son placement en maison de retraite, de sa mort, lassée de vivre encore, sans repère, sans amour. de ce qu'elle aurait pu être, de ce qu'elle a été.
Narrée et décortiquée par son fils, le sociologue Didier Eribon, elle nous apparaît dans toute son humanité - navrante par certains aspects, fragile, amoureuse et fofolle, effrayante quelquefois, touchante souvent.
La vieillesse est tue, elle est cachée, pas assez étudiée. Eribon nous donne beaucoup de pistes, de lectures, pour y remédier, pour creuser encore plus son propos déjà hyper interessant.
Didier Eribon aborde également les Ephads, les maisons de retraites, les maltraitances - souvent dûes à des manquements financiers ou de personnels - que les personnes âgées subissent.
Etant la fille d'une vieille femme, pas toujours simple à vivre, j'ai pu prendre conscience de beaucoup de choses, des angoisses qu'elle peut taire - consciemment ou pas.
Je me souviens d'un bout de lecture dans le métro ou mon émotion est montée en flèche, je suis arrivée chez elle, me disant que horrible ou pas, je la prendrais dans mes bras pour lui montrer à quel point je l'aime (même si elle me rend dingue ;) ).
Un essai en retenue, en douceur, en justesse.
On peut lire ce témoignage comme une prolongation de « retour à Reims », puisqu’on y retrouve sa mère qui ayant perdu son autonomie est placée dans un ehpad et dont l’auteur va compléter l’histoire. Le déchirement que provoque cette situation, pour la mère et les enfants est particulièrement bien décrit ainsi que le cheminement de la vie d’une femme du peuple qui aura cumulé et surmonté de nombreuses embûches. A partir de ce cas particulier, particulièrement significatif, Didier Eribon nous propose une réflexion approfondie sur la vieillesse en s’appuyant sur de nombreuses références littéraires et philosophiques, parfois difficiles à suivre pour un lecteur peu averti. L’ensemble constitue néanmoins une analyse remarquable sur le sujet.
A lire ! un peu complexe par moment mais le récit de sa vie et la vision sociologique que Didier Eribon propose est exceptionnelle (mais tellement universelle)Je ne suis jamais vraiment sortie de ce livre !
Didier Eribon est philosophe et sociologue. Cet ouvrage est celui d’un parcours, de ceux pour lesquels on ne parierait pas un kopeck quand on connaît le milieu dont il est issu.
Fils d’un ouvrier, et d’une femme de ménage, son parcours scolaire est très atypique, à l’aune de ce qui se pratique dans sa famille. Il fait partie des rares qui échappent, mais pas complètement, à la sélection liée, non aux mérites et aux capacités, mais à l’origine sociale. Et l’auteur insiste sur le fait que cette sélection n’est pas réservée aux années collège et lycée. Une fois passé le Rubicon du baccalauréat, les filières efficaces sont l’apanage d’une élite informée, qui n’ira pas perdre son temps sur les bancs d’une université qui n’est une aporie.
Cette situation hors norme au sein de sa famille le conduit à un rejet, et ce d’autant qu’il est homosexuel, ce qui est une infamie pour ses parents, et l’on imagine la jeunesse de l’auteur visé et atteint à chaque plaisanterie ou insulte à l’égard de « gens comme lui ».
Un parcours douloureux donc, et un ressenti qui n’est pas sans rappeler ce qu’Annie Ernaux a pu partager dans ses écrits, auteur d’ailleurs citée à plusieurs reprises.
On retrouve aussi ce sentiment d’équilibre instable entre deux mondes, volontairement à l’écart de sa famille, mais avec l’impression tenace de ne pas être accepté dans son nouvel environnement, qui pourtant le comble dans son désir de connaissances. C’est la même chose pour ceux dont la famille a du quitter ses terres d’origine, et qui deviennent étrangers à vie que ce soit sur la terre d’accueil ou sur celle qu’ils ont quittée.
Double question de l’identité sociale et sexuelle, sur le modèle d’une auto-analyse sincère.
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