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[Interview] Fabrice Humbert, l'origine de la violence

« Les professionnels du cinéma pensent images quand l’écrivain pense mots »

[Interview] Fabrice Humbert, l'origine de la violence

- Fabrice Humbert, L’Origine de la violence (ed Le Passage) a reçu le 1er Prix Orange du Livre en 2009. L’Origine de la violence est aussi le titre du film réalisé par Elie Chouraqui qui sort le 25 mai. Rappelez-nous comment s’est conclue votre collaboration sur cette adaptation ?

 

Elie a lu une critique du roman le Nouvel Obs, au moment de sa sortie. Il a eu envie de lire le livre et l’a beaucoup aimé. Et ce n’est pas une expression de cinéma : Elie adore le livre, vraiment. J’ai fait sa connaissance pour cette adaptation. Il occupait une place particulière pour moi car son film Qu’est ce qui fait courir David a été le premier film « de grand » que j’ai vu, autour de l’âge de 10 ans, avec ma mère.
Au fil de notre collaboration, nous sommes vraiment devenus des amis. Maintenant, je soutiens le film, je suis associé à tout et je l’accompagne.

 

- Lors de la première du film, vous avez confié : « J’aurai tout fait pour Elie, même videur ». Vous aimez le cinéma à ce point ?

J’aime beaucoup le monde du cinéma, même si c’est le roman qui me donne le plus de plaisir en terme de travail. L’élan qu’il y a dans une page d’écriture, on ne peut pas le retrouver, à mon sens, dans le cinéma. C’est ce qui me frappe en travaillant en tant que scénariste. Il y a quelque chose de très laborieux dans la fabrication d’un film. Le cinéma est très fluide dans sa réception, mais incroyablement laborieux, répétitif, découpé dans son élaboration. C’est plus agréable, et tellement simple d’être assis devant l’écran.

 

- Et cependant, vous aimez beaucoup ce milieu. Pourquoi ?

Le cinéma est fascinant : il rassemble des personnalités très différentes, des gens qui viennent de toutes parts. On y trouve le meilleur et le pire dans les rapports humains, mais toujours des relations très fortes. Ca m’intéresse.

Cela n’est qu’un troisième métier pour moi, je suis d’abord professeur et écrivain, puis scénariste, mais pas réalisateur ni producteur, qui sont les métiers les plus exposés aux rapports frontaux difficiles. Les relations humaines peuvent être d’une grande brutalité, sans doute surtout parce que l’argent est au cœur de chaque question qu’on se pose : tout plan implique de penser à ce qu’il va coûter, par exemple. Cela détermine évidemment les rapports entre les hommes.

 

- Jusqu’à quel point vous impliquez-vous dans le cinéma ?

Je me suis inscrit cette année en licence de cinéma à Paris VII. J’y ai étudié le cinéma, théoriquement plus que pratiquement. Et comme il faut faire un film dans son cursus, j’ai eu l’occasion de comprendre que le cinéma est un métier avec un apprentissage très long et très difficile. La fascination pour le milieu et l’image que projette le cinéma dans l’esprit des gens, obscurcit le travail du cinéma qui est très différent, mille fois plus artisanal et technique que les gens ne l’imaginent. Il faut faire attention à ne pas dévaloriser, occulter les formations longues et exigeantes de ces gars qui vont mettre parfois 20 ans à faire un film, en passant par tous les métiers. A l’exception de quelques-uns qu’on bombarde réalisateurs et dont les carrières font long feu.

 

- Vous avez donc réalisé un film !
Oui, un court métrage qui s’appelle Café noir et, honnêtement, c’est un film de débutant! Mais l’expérience m’a permis de comprendre que le cinéma est un vrai métier, et un métier difficile.

 

- Mais pourquoi avez-vous pris des cours de cinéma ?

D’abord en tant qu’enseignant, on a de plus en plus des cours qui associent littérature et image, les liens entre littérature et cinéma sont passionnants. Mais surtout, et très honnêtement, j’ai vraiment beaucoup aimé adapter mon roman en film. L’envie de passer moi-même à la réalisation m’a taraudée. En retournant sur les bancs de la fac, j’ai vraiment compris la différence entre le vague désir de faire un film et faire un film pour de bon. Même un court métrage. Quand on se retrouve à tourner et qu’on ne sait pas ce qu’il faut faire, je vous assure que l’impression est vraiment très désagréable. Le court métrage qu’on a fait est drôle mais la réalisation est nettement insuffisante. Un réalisateur est d’abord un homme concret capable de gérer une foule de gens et de métiers très différents, capable aussi de considérer les questions financières, mais c’est aussi un artiste, et il est très difficile de conserver une dimension artistique sur un film.

 

- La réalisation n’est donc pas à l’ordre du jour pour vous. Allez-vous toutefois poursuivre l’expérience de l’écriture scénaristique ?

Bien sûr, si j’ai le temps entre mon métier de professeur, ma vie de famille et la littérature. Il semble qu’Avant la chute puisse être bientôt adapté en série, alors je vais m’y remettre. J’aime vraiment travailler sur les adaptations de mes livres.

 

- L’exercice d’adapter ses propres livres doit être un peu particulier, et sans doute impliquer pas mal de frustrations, non ?

C’est spécial, en effet, et j’avoue avoir éprouvé les difficultés qu’on rencontre à son premier scénario. J’ai compris d’emblée que la littérature n’était un double du cinéma qu’en apparence. Ce sont certes deux arts narratifs, mais passer de l’écriture à l’image détermine une autre approche. On a été obligé de transformer le livre. Pour faire spectacle, l’unité d’action est déterminante au cinéma, plus que dans un roman.

Cela n’a pas été évident, mon scénario était trop sec. Vous savez, un scenario est un squelette, et les seuls instruments à disposition de l’écriture sont le dialogue et l’action. Il faut réussir à donner de la chair aux personnages juste avec ça et c’est très difficile. Elie a beaucoup enrichi le scenario. Encore une fois, c’est un métier. Les professionnels du cinéma pensent images quand l’écrivain pense mots. Le vrai scénariste écrit une phrase qui est déjà une image.

 

- Les droits de tous vos romans ont été achetés…

Oui mais certains projets n’ont pas été faits ou ne se feront pas parce qu’il est très difficile de monter un film. Le producteur qui achète les droits doit trouver l’argent et le réalisateur qui va aller avec le film. Désormais, je crois que la vie du livre, si tout va pour le mieux (ce qui est rare) se décline en trois temps : la sortie du grand format, celle du poche, puis la sortie de l’adaptation au cinéma. Les liens entre littérature et cinéma sont de plus en plus étroits.

 

- Et la littérature ? A quand la publication d’un nouveau roman ?

Ce sera normalement pour septembre 2017 chez Gallimard. Je travaille…

 

Propos recueillis par Karine Papillaud

 

Retrouvez notre article :

[Film] L’Origine de la violence, en avant-première

 

 

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Commentaires (5)

  • Myriam De Grauw le 10/06/2016 à 10h47

    J'ai vu Elie Chouraqui et Richard Berry à la TV qui parlaient de ce film. Par leur enthousiasme pour leur travail, ils m'ont donné envie de voir leur film. Je ne savais pas qu'il était tiré d'un livre. En lisant sa présentation pour le tirage au sort par votre site, j'ai été intéressée par la collaboration de l'auteur et du cinéaste et donc la fusion entre livre et le film. Ce qui m'a donné très envie de lire le livre avant de voir le film. Peut être aurais-je la chance d'être sélectionnée. Posséder ce livre dédicacé... Super !

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  • Lili Kro le 10/06/2016 à 08h39

    Ne connaissant pas cet auteur et aimant les romans traitant de la guerre, j aimerais gagner ce livre et partager mon avis.

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  • Lili Kro le 10/06/2016 à 08h39

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  • Lili Kro le 10/06/2016 à 08h39

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